La force de la Foi
Croyances pré-chrétiennes
Il y a un panthéon de dieux et une croyance dans un autre monde surnaturel. Arbres, collines, eau, soleil et animaux sont sacrés. Il y a des fêtes annuelles liées aux cycles agraires et à la fertilité. On peut noter le grand rôle des druides.
Les symboles pictes
Il y en a au moins cinquante, souvent associés par deux. On les trouve principalement sur des sculptures ou des objets de haut statut. Peut-être étaient-ils également utilisés sur du bois, du cuir, du tissu ou comme décoration corporelle, mais on en a évidemment aucune trace. Certains de ces dessins incorporent des éléments du style La Tène (culture pré-romaine de l’Age du Fer des celtes de l’Europe du nord-ouest). On pensait que ce style s’était éteint au Ier ou IIè siècles, mais des trouvailles du VIIè siècle en Ecosse et en Irlande montrent qu’il était toujours courant dans la première moitié du millénaire.
Ces symboles pourraient représenter un langage plutôt que des idées. Pour certains, ces symboles serviraient à inscrire le nom de personnes. Si c’est le cas, on pourrait attribuer le déclin de ces symboles à l’émergence du gaélique. Cela expliquerait aussi pourquoi ils sont acceptés sur les monuments chrétiens : si c’est un langage, ce n’est pas un symbole païen.
Des dessins sur la pierre, des intentions dans le dessin
La majorité des dessins qui nous restent sont gravés sur des pierres ou des croix. S’ils représentent bien des noms, ces pierres pourraient alors être des pierres tombales, ou des mémorials. Ces pierres dateraient d’entre le IVè et le VIIIè siècles. On retrouve les symboles sur des chaînes (votives ?) des Vè-VIè siècles et quelques autres objets du VIIè siècle. Si ces dates sont exactes, cela date d’un moment où les Pictes sont chrétiens (en tout cas, certains d’entre eux).
Ces pierres se retrouvent à des endroits de culte préhistoriques. La réutilisation de lieux de culte païens par les chrétiens est courante, mais on ne peut pas savoir si ces monuments sont construits pour le christianisme ou en réaction envers lui. Quand ces pierres sont proches de cimetières, il est impossoble de savoir si les enterrements sont chrétiens (même si ce sont des corps sans objets avec juste un linceul ; ce qui est souvent la marque d’un enterrement chrétien). Ca pourrait être juste une influence.
D’autre part, ces pierres sont contemporaines de l’apparition du royaume picte et elles pourraient constituer un système symbolique standardisé, sous le contrôle d’une élite politique ou religieuse. Un moyen d’établir ou de renforcer une position ?
L’église sous-romaine
Ce n’est pas Columba qui a le premier apporté le christianisme aux pictes, mais plutôt son professeur, Uinniau, un britton. Quand Columba rencontre Bridei, il est peut-être déjà chrétien. Le christianisme sous les romains est attesté par des noms de lieux (en eccles_), mais on ne peut rien déduire des entererments en linceul sans objets car ceux-ci ont existé depuis le IIè siècle en Ecosse, donc avant l’arrivée du christianisme. On ne sait pas comment l’arrivée de cette religion a été prise par les populations.
L’église de Columba en Argyll
Bien que certains Dal Riatha aient pu être convertis avant, le christianisme fait vraiment son apparition avec Columba en 563. Il se base à Iona, terre donnée par un roi sans doute déjà chrétien. Le christianisme apparaît au début du Vè siècle en Irlande, mais on accorde la majorité de la conversion à Patrick (460), qui encourage la vie monastique. Iona, sur une île, convient à l’ascetisme monacal. On y trouvait une église, des huttes pour les moines, plus une ou deux pour Columba, une maison pour les invités et un bâtiment commun (cuisine et réfectoire ?). Tout cela était sans doute en bois. Les croix indiquaient les lieux d’enterrement et les lieux saints ; elles étaient aussi des lieux de prêche. Le monastère avait également des champs et une économie fermière.
Il existe d’autres Eglises gaéliques, qu’on connaît peu à cause de l’Eglise de Columba qui a été si forte et importante. Mais il y en avait de nombreuses autres.
Archéologie de l’Eglise dans l’ouest
On reconnaît les premiers sites chrétiens grâce aux noms de lieu, à la taille et à la forme des périmètres, aux sculptures, aux enterrements, aux batiments et aux puits. Il est difficile cependant de dater les enterrements chrétiens vu qu’il n’y a pas d’objets. Il y a une commune continuité entre les lieux païens et chrétiens, et de nombreux sites sont associés à des puits, aux vertus guérisseuses, etc…
L’Eglise gaélique et la plus large société
Comment le christianisme a-t-il affecté l’histoire de la société ? En Irlande, les monastères co-existaient avec elle, mais en étaient complètement séparés. Les abbatiats étaient souvent héréditaires, et il était courant dans les familles dirigeantes que l’aîné soit seigneur et le cadet abbé. Columba s’investissait dans la politique et a peut-être sacré un roi. Mais quel rôle du clergé dans la population ? Il y a peu de distinction apparemment entre le moine et le prêtre séculier. Les évèques ont un travail de missionaires. Beaucoup d’endroits semblent être des lieux de prêche, et certains clercs administraient baptême, communion et extrême-onction. Il existe également des itinérants et des transferts de reliques. On ne sait pas trop si l’Eglise avait un rôle effectif dans le baptême (même s’il y a des bassins et les puits sacrés), ni dans l’enterrement. En Orlande, être enterré autour de l’église ne devient la norme qu’au VIIIè ou IXè siècles.
Etablissement de l’Eglise picte
L’Eglise a un rôle crucial à la fin du VIIè siècle dans l’établissement du concept d’une seule royauté picte. Une dispute apparaît entre Eglise romaine et Eglise de Columba, chacune voulant la suprématie. Le prétexte est la date de Pâques, mais c’est en réalité une lutte de pouvoir. En Northumbrie, le synode de Whitby en 664 tranche pour l’Eglise romaine. En Argyll, les moines d’Iona perdent donc leur influence sur la Northumbrie. En 688, Adomnàn est persuadé, et promouvoit les pratiques romaines au Pictland. Iona ne suivra qu’en 712. En 716, l’Eglise picte passe officiellement de columbaine à romaine : instauration de la Pâques catholique, et mise sous la protection de Saint Pierre.
Cependant les pratiques romaines avaient déjà été adoptées, mais l’introduction consciente de cette Eglise réformée à travers le royaume entier comme L’Eglise picte était un moyen à la fois de consolider et d’étendre l’autorité royale. Les nobles locaux acquérirent de l’autorité en s’associant avec cette nouvelle source de pouvoir, qui élargissait également leurs possibilités de carrières. L’Eglise assistait également le pouvoir dans les matièrse administratives. Au VIIIè siècle, on assiste à une symbiose entre le roi et l’Eglise. En échange, l’Eglise obtenait des terres (et les droits associés) dont elle avait besoin pour la nourriture et les revenus. Les croix et pierres taillées pictes de cetet époque seraient alors, plutôt que des pierres tombales, des professions de foi en la nouvelle Eglise réformée. Là où elles sont abondantes, c’est sûrement là où l’aristocratie locale soutenait la nouvelle Eglise avec le plus de ferveur. A la fin du VIIIè et au IXè siècle, de nouveaux monuments funéraires apparaissent, montrant que l’Eglise s’est fermement établie dans l’enterrement des nobles en tout cas.
L’usage de l’écriture
La littérature est promue par l’Eglise. En Irlande et en Ecosse, on trouve des pierres-alphabet, peut-être une aide à l’apprentissage, mais plus sûrement un symbole de l’accès à la lecture et à la parole de Dieu. Les hauts membres de l’Eglise étaient des lettrés très cultivés et éduqués. Les monastères produisent des manuscrits sur parchemin. Etre lettré permet de stocker les connaissances et de les transmettre. Cependant cela reste un monopole clérical. La première preuve d’un roi utilisant l’écrit date du début du IXè siècle. D’autre part, certains clercs comprenaient le latin.
L’Eglise plus tardive
On ne trouve plus de symboles pictes à partir de la fin du VIIIè siècle, et à la place des scènes de chasse, on trouve des scènes militaires, sans doute parce que le renforcement de l’autorité royale passe par la puissance militaire. La civilisation picte s’efface devant les intérêts gaéliques des rois.